Les Archinatures de Vincent Callebaut
Portrait
Brussels 2020
Belgium
L’architecte belge (né à La Louvière), installé à Paris, réfléchit à la ville de demain. Ses projets visionnaires et prospectifs nous transportent dans un monde plus écologique où la campagne recolonise l’espace urbain.
Imaginez Paris en 2050, avec des potagers suspendus et la tour Montparnasse en prolongement du jardin du Luxembourg, ses ponts habités, sur le modèle ancien du Ponte Vecchio à Florence, ses artères mythiques, comme la rue de Rivoli, végétalisées par une nature sauvage, ses immeubles haussmanniens coiffés de jardins maraîchers avec des murs transformés en épidermes producteurs d’énergie… Vincent Callebaut présente aussi un projet de régénération de la cathédrale Notre-Dame incendiée hors du commun. Une sorte de greffe végétale harmoniserait d’un seul trait toit et flèche, et permettrait de transformer le bâtiment énergivore actuel en une architecture positive, en produisant plus d’énergie qu’il n’en consommerait. Collaborant avec des scientifiques et des ingénieurs, croisant les savoirs et les disciplines, Vincent Callebaut n’est pas un utopiste et il rencontre un véritable public en Asie. Le travail de son agence, installée à Paris, offre des réponses concrètes à la cité post-pétrolière. Elles rejoignent toutes les préconisations actuelles d’utilisation de matériaux biosourcés, recyclés et recyclables selon les normes cradle to cradle (une philosophie de la production industrielle qui intègre, de la conception au recyclage, une exigence écologique dont le principe est zéro pollution et 100 % réutilisé, NDLR). Enfin, ses théories optimistes et son message positif balaient le catastrophisme ambiant en démontrant que l’Homme doit s’allier avec la Nature pour survivre et essayer de réparer les erreurs et les dégâts commis par l’industrialisation et l’agriculture intensives.
Écoquartiers, champs en plein ciel, cultures étagées… Vincent Callebaut retravaille la notion de verticalité. Et ses bâtiments verts et vivants, en absorbant les nuages de pollution, permettraient de diminuer de 75 % les gaz à effet de serre. Parmi ses projets en cours de construction, une tour hélicoïdale de 42 étages, qui reprend la structure d’un brin d’ADN, à Taïwan, avec 25 000 arbres plantés au sol et sur les balcons, capables d’absorber 130 tonnes de CO2. Achèvement prévu en 2023, La Mousse des Vagues, en Savoie, refonte d’anciens thermes au nouveau dessin caractérisé par des terrasses très feuillues en forme d’onde, intègre une ferme urbaine et s’impose en bâtiment positif. Vincent Callebaut nous rappelle aussi que la nature, depuis plus de 3,8 milliards d’années, invente des formes intelligentes.
Sur le principe du biomimétisme, son architecture emprunte le dessin des libellules et des nénuphars, le système de ventilation des termitières ou le concept d’habitat alvéolaire de la ruche des abeilles. Plutôt que de lutter contre la nature, elle propose un mariage né d’une observation fine de tous ses mécanismes et rouages. Ses projets de rénovation sont également remarquables, voire exemplaires, d’un point de vue architectural, comme celui de l’Hôtel des Postes de Luxembourg-ville, qui intègre dans la cour un volume oblong pour optimiser la surface au sol, un dôme en verre équipé de cellules photovoltaïques et supprime les extensions du début XXe tout en valorisant l’identité originale du bâtiment. Futuriste certes mais sans renier le passé.
À la manière d’un Léonard de Vinci du XXIe siècle, il pense des projets qui n’offrent pas une vision limitée de l’urbanité. Certains, en recherche et développement, ont carrément les pieds dans l’eau. La cité est réinventée, à la manière des anciennes villes lacustres. Ainsi le projet Lilypad, reprenant la forme d’une feuille de nénuphar pour construire une ville flottante et accueillir les réfugiés climatiques. Alors que 7 % des Pays-Bas et 80 % de l’archipel des Maldives seront submergés par la montée des eaux et que de nombreuses îles risquent de disparaître, Vincent Callebaut opte pour une vie en osmose avec la nature et les océans. À noter, le projet Solar Drop à Abu Dhabi, jardin subaquatique et coupole bioclimatique végétalisée, équipée de cellules photovoltaïques, un travail de collaboration avec un jardinier de la mer pour retrouver la faune et la flore endémiques. Coral Reef, un projet réalisé dans le port de la ville de Port-au-Prince, un récif corallien autosuffisant composé de deux grandes vagues de végétation où sont cultivés des fruits et des légumes biologiques, utilise la force des marées.
L’esprit de Vincent s’envole. Il a inventé un nouveau moyen de locomotion totalement écologique avec un carburant en adéquation. Son Hydrogénase, produit de l’économie circulaire et d’une nouvelle forme de mobilité, tout en s’inspirant de la beauté des formes de la nature, fonctionne avec les qualités de ses matériaux, des biocarburants dits de troisième génération à base d’algues. Cet aéronef est capable de générer de l’électricité et des biocarburants sans émettre de CO2. Ainsi Paris pourrait devenir une ville pionnière avec le projet Physalia (Méduse) de jardins flottants et, surtout, le système Smart Grid, qui propose d’échanger l’énergie des bâtiments positifs et abandonner le pouvoir hégémonique des énergies fossiles. Sur le principe d’un Facebook de l’énergie, Vincent Callebaut a imaginé un système social, solidaire et équitable qui permet de partager l’énergie produite en surplus… Vers un monde meilleur et plus responsable.
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